Interview alumni : Marie PICHONNAZ, directrice artistique et photographe de mode.

Interview alumni : Marie PICHONNAZ, directrice artistique et photographe de mode.

Et si la créativité n’était pas un don, mais une discipline ? Marie PICHONNAZ en est convaincue. Avec une approche aussi rigoureuse que sensible, elle a bâti une carrière entre photographie de mode, direction artistique et stratégie de contenu. À travers son témoignage, elle nous parle d’exigence, d’adaptation, et du rôle du regard dans un monde saturé d’images.

Pouvez-vous vous présenter ainsi que votre métier ?

Je m'appelle Marie PICHONNAZ, je suis directrice artistique et photographe de mode entre Londres et la Suisse. 

Mon métier a plusieurs facettes : je conçois des identités visuelles, je travaille sur des campagnes, je réalise des shooting photo, je participe à des brainstormings, j'élabore des stratégies de contenu pour les marques, notamment sur les réseaux sociaux. En freelance aujourd'hui, mes journées sont variées : entre prospection, shooting, retouches et accompagnement stratégique de mes clients, recherche et développement de nouveaux concepts pour ma pratique artistique et reportage backstage de défilés à la Fashion Week.

Pourquoi vous êtes-vous lancée en freelance ?

Le mode de vie freelance me correspond mieux. Je n'aime pas être enfermée huit heures par jour derrière un bureau. La créativité, ce n'est pas linéaire : j'ai besoin d'espace, de liberté. Et à Londres, même avec un emploi à 100 %, on ne vit pas forcément bien. En freelance, j'ai plus de flexibilité pour travailler sur des projets plus ambitieux, voyager, et avancer à mon rythme.

Quels sont les principaux défis que vous rencontrez en tant que directrice artistique et photographe de mode ?

La compétition, bien sûr. Il y a beaucoup de talents et peu de places. Mais je pense qu'on peut tous trouver sa voie si on se soutient plutôt que se comparer. Un autre défi est de devoir constamment s'adapter. En agence, j'ai parfois travaillé pour des clients dans des secteurs qui m'étaient complètement inconnus : énergie, industrie... Il faut apprendre vite, comprendre les enjeux et savoir créer des visuels pertinents même dans des univers qu'on ne maîtrise pas et proposer des concepts innovants sur mesure.

Comment trouvez-vous vos clients ?

J'ai gardé de nombreux contacts de mes anciennes expériences : agences, prestataires, clients. Les réseaux sociaux sont aussi très utiles. Je n'hésite pas à contacter des personnes que je trouve inspirantes, à proposer des collaborations. J'ai aussi développé mon réseau à Londres, notamment grâce à mon master : pour mon projet final, j'ai travaillé avec 8 personnes ! Et bien sûr, LinkedIn reste un bon outil pour trouver des décideurs, découvrir des entreprises, deviner les e-mails et proposer ses services.

Quelles études avez-vous suivies pour en arriver jusqu’ici ?

J'ai fait un bachelor en direction artistique à CREA Genève. Pendant mes études, j'ai fait un stage dans une agence de pub, Franz&René à Berne, puis j'ai travaillé pour Jaeger-LeCoultre, une maison de haute horlogerie au sein de l'équipe Brand Identity. Là, je créais les visuels de la marque et je gérais les réseaux sociaux. Ensuite, j'ai rejoint Take Off Productions, une agence de production vidéo, où j'ai créé mon poste de directrice artistique. Cela m'a permis de participer à des campagnes, écrire des scénarios, créer des campagnes digitales et travailler en équipe sur des projets variés, en studio et sur le terrain, tout en développant mon intérêt pour la photographie.

La photographie, je l'ai apprise en autodidacte. J'ai commencé adolescente par des concerts, puis des shootings mode avec des amies modèles. Petit à petit, j'ai proposé ce service à mon entreprise et j'ai ajouté cette corde à mon arc.

Après trois ans dans cette entreprise, j'ai ressenti le besoin de changement. Mon rêve, depuis longtemps, était de partir à Londres. J'y avais vécu six mois enfant, et j'avais gardé le souvenir d'une ville dynamique et créativement plus ouverte que la Suisse. À 26 ans, j'ai décidé de postuler au London College of Fashion, UAL. J'ai été acceptée pour un master en photographie de mode. Ce changement a été un vrai tournant.

J'y ai trouvé une approche artistique bien plus personnelle : on créait non plus pour répondre à une commande, mais pour exprimer sa voix, affirmer son style. Ce cadre m'a beaucoup nourrie la rencontre avec mes camarades internationaux, l’accès à un environnement propice à la création, au matériel et a prise de recul par rapport à la Suisse pour mieux comprendre mon essence et ce que je veux transmettre dans mon travail..

Pourquoi avoir choisi CREA Genève ?

J'étais déjà attirée par la photographie, mais CREA Genève m'a séduite par son approche multidisciplinaire. On ne se limite pas à une seule compétence, on apprend à travailler en équipe, à être créatif, stratégique, à comprendre les besoins des clients et à avoir des compétences concrètes en graphisme, photo, video, essentiel pour être un couteau suisse dans ce milieu toujours plus demandant.

Avez-vous un souvenir marquant de vos études ?

Je dirais les nuits blanches passées avec mes camarades pour finaliser nos projets. C'était intense, on mangeait des pizzas, on stressait, mais on était soudés. Et puis certains cours de direction artistique étaient très inspirants. J'ai gardé de bons contacts avec mes anciens camarades et intervenants.

Quels conseils donneriez-vous aux étudiants actuels ?

D'être curieux. L'inspiration ne vient pas que de Pinterest. Sortez, discutez, allez voir des expos, regardez des films, observez le monde. Notez vos idées, prenez du temps pour assimiler, pour comprendre ce qui vous touche. Et surtout, n'ayez pas peur de quitter une entreprise si elle ne respecte pas vos valeurs. Il faut oser, s’affirmer. La créativité demande de la rigueur et de l'audace.

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