Interview alumni : Nicolas LIECHTI, responsable de la communication pour l’État de Vaud

Interview alumni : Nicolas LIECHTI, responsable de la communication pour l’État de Vaud

Et si, en un clic, on pouvait savoir vers quel centre d’urgence se diriger sans perdre de temps ? C’est le pari qu’a relevé Nicolas LIECHTI, diplômé CREA Genève, en créant Medigo tout en occupant un poste stratégique de communication au sein de l’État de Vaud. Entre vision, rigueur et passion pour le branding, il partage avec nous son parcours étonnant, entre secteur public et innovation santé.

Pouvez-vous vous présenter ?

Je m'appelle Nicolas LIECHTI. Aujourd’hui, j’ai deux casquettes professionnelles à mon actif : je suis à la fois responsable de la communication pour un service de l’État de Vaud, qui œuvre dans la construction publique, la sauvergarde de monuments historiques et l’archéologie, et cofondateur d’une start-up dans le domaine de la santé digitale.
Ce sont deux univers très différents, mais profondément liés par le sens de la communication, l’envie de rendre les choses compréhensibles, accessibles et utiles.

Quelles sont vos missions dans votre poste de responsable communication ?

Il s’agissait d’une création de poste,. À mon arrivée, il n’y avait aucune stratégie de communication en place. Ma première mission a donc été d’écouter les équipes, de comprendre leurs besoins et leurs spécificités. On parle ici de profils très variés : architectes, archéologues, ingénieurs...

J’ai ensuite élaboré une stratégie globale de communication, pour donner de la visibilité à leurs projets. Cela passe par la mise en place de canaux digitaux (site, réseaux sociaux…), mais aussi de la communication traditionnelle (communiqués de presse, relations médias, brochures, expositions). L’enjeu principal est de valoriser des projets qui ont un impact direct sur le quotidien des citoyens, tout en expliquant leur complexité.

À qui s'adresse cette communication ?

Les cibles sont multiples. La communication s’adresse d’abord aux usagers des bâtiments publics, aux collaborateurs de l’État, aux partenaires institutionnels, aux élus et aux autorités politiques. Elle vise aussi les habitants et les communes concernées, afin que chacun – qu’il soit professionnel, citoyen ou décideur – comprenne clairement les enjeux, le financement public des projets et l’utilisation des impôts. L’objectif est de rendre lisible l’avancement des réalisations et leur impact concret.

On s’adresse également aux médias, qui relaient nos informations, ainsi qu’à tout un écosystème professionnel B2B : entreprises de construction, bureaux d’ingénieurs, mandataires spécialisés. Il faut adapter notre message selon chaque cible, avec un langage clair, transparent et pédagogique.

Pourquoi avoir choisi de travailler dans les institutions publiques ?

Ce choix s’est imposé de façon naturelle. Depuis plus de trente ans, j’évolue dans le domaine de la communication institutionnelle. J’ai débuté à l’Université de Lausanne, où j’ai contribué à la création du service de communication. Par la suite, j’ai rejoint le CHUV, l’hôpital universitaire du canton de Vaud, où, avec une petite équipe, j’ai eu l’opportunité de mettre en place l’ensemble du dispositif de communication interne et externe. J’y suis resté quatorze ans, période durant laquelle j’ai également entrepris un Master en communication à CREA Genève.

Pouvez-vous nous parler de votre start-up “Medigo” ?

Tout a commencé au CHUV. Le directeur nous a confié une mission : trouver une solution pour désengorger les urgences de l’hôpital, en particulier pour les cas non vitaux. En interrogeant un panel de personnes, nous avons constaté que beaucoup se rendaient presque systématiquement au CHUV, faute de connaître d'autres alternatives. Or, de nombreux centres médicaux d’urgence étaient en mesure de les accueillir, souvent plus rapidement.

Avec des collègues, nous avons imaginé une application mobile qui indiquerait en temps réel la disponibilité des centres d’urgence. Un code couleur simple (vert, jaune, rouge) permet d’indiquer si un centre est disponible, moyennement disponible ou saturé. L’algorithme se base sur les données médicales transmises par les centres toutes les cinq minutes. Nous avons lancé l’application en 2015, à Lausanne. En un mois, plus de 10 000 personnes l’avaient téléchargée !

Finalement, le CHUV nous a indiqué que le maintien de l’application ne relevait pas de sa mission première. Avec mes partenaires, nous avons donc décidé de créer une société indépendante, donnant naissance à Medigo. L’entreprise a été officiellement lancée en 2023. Aujourd’hui, l’application poursuit son développement, est déployée dans plusieurs cantons et enregistre plus de 1 600 consultations quotidiennes. Nous sommes une petite équipe et nous gérons encore cette activité en parallèle de nos emplois respectifs, mais son impact est bien réel.

Comment avez-vous fait connaître Medigo ?

Nos moyens étant limités, nous avons privilégié une approche très ciblée. Nous avons commencé par solliciter la presse locale, en diffusant des communiqués soigneusement préparés. Ensuite, nous avons concentré nos efforts sur les réseaux sociaux. Les campagnes menées sur Facebook et Instagram ont rencontré un franc succès, en particulier auprès des familles avec enfants. Même si cela peut sembler un cliché, ce sont souvent les mères qui gèrent les urgences de santé à la maison — elles constituent donc notre cœur de cible. Ce ciblage précis nous a permis de gagner rapidement en visibilité.

Comment conciliez-vous ces deux vies professionnelles ?

Ce n’est pas simple, mais c’est possible ! J’organise mes semaines avec un temps clair pour chaque activité : 80% pour mon emploi institutionnel, et 20% pour la start-up, principalement le vendredi, le matin dans le train, le soir et le week-end. L’important, c’est de ne pas mélanger les deux casquettes, de rester concentré sur l’une ou l’autre selon le moment.

Pourquoi avez-vous choisi de travailler dans la communication ?

C’est une passion de longue date. Depuis l’enfance, j’ai été fasciné par la publicité, les marques, le branding. J’ai toujours eu envie de comprendre comment un message se construit, comment on peut toucher un public, convaincre, séduire ou informer.

J’ai aussi eu la chance de commencer ma carrière au moment de la naissance d’Internet. En 1995, avec un ami, nous avons lancé un projet pour publier les annonces immobilières en ligne. On était trop en avance sur notre temps, car peu de gens avaient Internet à cette époque, mais c’était formateur. J’ai appris à créer un site web, à pitcher une idée, à se tromper… et à recommencer.

Pourquoi avoir choisi CREA Genève pour votre formation ?

J’ai fait CREA Genève sur le tard, en 2013-2014. J’avais déjà une longue expérience professionnelle, mais je voulais valider mes compétences avec un diplôme et surtout me mettre à jour sur certains outils, notamment les réseaux sociaux, qui avaient énormément évolué.

Ce que j’ai aimé chez CREA Genève, c’est l’approche pratique, dynamique, ancrée dans la réalité professionnelle, avec des intervenants souvent issus du terrain. Ça m’a permis de rester à la page et d’ouvrir de nouveaux horizons.

Quel est votre meilleur souvenir de CREA ?

Je garde un souvenir très fort de certains cours de branding, mais aussi des professeurs qui nous ont challengés intellectuellement, parfois de manière un peu rude, mais toujours avec bienveillance. Tous ces moments m’ont permis de me remettre en question et de progresser, même après des années de carrière.

Quel conseil donneriez-vous aux étudiants de l’école ?

Je leur dirais : profitez de l’élan que vous avez en sortant de l’école. On est plein d’idées, de concepts, d’énergie. Il faut oser très vite, avant que le quotidien ne prenne le dessus. Lancez un projet, testez une idée, créez quelque chose, même petit.

Et surtout, n’ayez pas peur de l’échec. Moi aussi, je me suis planté. Ce n’est pas grave, c’est comme ça qu’on apprend. L’important, c’est de rester curieux, motivé et audacieux. Il n’y a jamais de bon moment pour se lancer. Alors autant le faire maintenant.

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