Interview de Sacha ROTH, Directeur artistique et réalisateur chez Tataki (RTS)

Depuis ses premières vidéos entre amis à son poste de directeur artistique chez Tataki (RTS), Sacha Roth, diplômé en 2019 du Bachelor en Direction Artistique à CREA, trace un parcours passionné et engagé dans la création de contenus pour les jeunes. Entre reportages poignants, médias et liberté créative, il revient sur son métier, ses inspirations, et ce que l’expérience de l’école CREA lui a apporté.
Pouvez-vous vous présenter et nous parler de votre métier ?
Je m’appelle Sacha Roth et je travaille chez Tataki, la rédaction de la RTS (Radio Télévision Suisse) dédiée aux jeunes. Je suis à la fois réalisateur et directeur artistique. Je conçois et réalise principalement des formats d’enquête et de reportage pour notre chaîne YouTube, tout en supervisant la direction artistique de la marque : contenu digital, merchandising, opérations spéciales et événements.
Tataki (RTS), c’est un média 100 % digital, pensé pour les 15-25 ans en Suisse romande. Toute notre offre est diffusée directement sur les réseaux. Nous sommes une équipe jeune qui produit du contenu pour les jeunes, avec une mission claire : proposer des sujets à la fois utiles, engageants et divertissants. Aujourd’hui, nous rassemblons plus de 3 millions d’abonnés cumulés sur l’ensemble de nos plateformes.
Quelles sont les qualités essentielles pour exercer votre métier ?
La curiosité est essentielle. Il faut avoir soif d’apprendre, découvrir et comprendre des sujets variés. Il faut aussi être vif, réactif, et accepter des horaires parfois irréguliers. C’est un métier prenant, parfois intense, qui demande de la passion. Il faut également savoir travailler en équipe et rester à l’écoute.
Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans votre travail ?
La diversité des journées. Je me lève rarement pour faire deux fois la même chose. C’est très stimulant créativement. Chaque projet est différent, chaque format est une occasion d’innover. Et l’équipe est très solidaire, ce qui favorise la créativité et le plaisir au travail.
Pouvez-vous donner des exemples concrets de missions que vous avez réalisées ?
Par exemple, un jour je peux travailler sur la réalisation d’un long format d’enquête pour notre chaîne YouTube, le lendemain préparer les Tataki Awards, une grande opération qui met en avant les jeunes artistes suisses, et le surlendemain gérer le lancement de la nouvelle ligne de merchandising. C’est un travail très varié : événementiel, digital, terrain, production…
Avez-vous connu des challenges marquants dans votre carrière ?
Oui, bien sûr. Le dernier qui me vient en tête, c’est le documentaire que nous avons tourné au Népal. En Mars dernier nous avons accompagné un jeune Suisse de 24 ans, d’origine népalaise, qui retournait pour la première fois dans son pays natal, et plus particulièrement dans l’orphelinat où il avait été abandonné puis adopté. L’expérience a été intense, tant sur le plan humain que technique, notamment durant les quatre jours de tournage à Katmandou. Ensuite, nous avons eu un mois et demi de postproduction pour construire toute la narration du reportage et aboutir à la réalisation finale.
Ce reportage est-il disponible en ligne ?
Oui, sur notre chaîne YouTube. Il est sorti fin mai. Même si ce n’est pas la vidéo la plus vue de notre chaîne, on en est très fier. On a aussi reçu beaucoup de très bons retours de personnes directement concernées par le sujet. C’est exactement ce type de contenus porteurs de sens que nous aimons produire.
Quel est votre parcours scolaire et pourquoi avoir choisi l’école CREA ?
J’ai suivi le Bachelor en Direction Artistique à CREA, dont j’ai été diplômé en 2019. Avant cela, je faisais déjà des vidéos sur YouTube et de la photo depuis mes 12 ans, donc je cherchais naturellement à continuer dans cette voie. Ce qui est intéressant à CREA, c’est qu’on y apprend non seulement une base technique pour développer ses projets, mais aussi à les vendre. En revanche, il faut arriver avec des objectifs clairs, savoir prioriser certaines compétences et s’investir. Il faut voir l’école comme une boîte à outils : on y prend ce dont on a besoin, mais il ne faut pas s’attendre à ce qu’on nous apprenne à tout faire. Trouver des projets en dehors des cours est indispensable pour progresser et s’ouvrir des portes ensuite. Les vendredis sans cours sont d’ailleurs très utiles pour ça.
Quel est votre meilleur souvenir à CREA ?
Les workshops du week-end ! Très intenses, parfois jusqu’à 3 h du matin. L’un d’eux m’a particulièrement marqué : un jeu de piste ARG grandeur nature à Genève, imaginé et organisé par les étudiants eux-mêmes, où nous étions à la fois joueurs et organisateurs. Fatiguant mais c’était vraiment très drôle.
Quels conseils donneriez-vous à un étudiant qui souhaite suivre votre voie ?
Il faut avoir la dalle, être curieux et ne pas attendre que l’école fasse tout. Choisissez ce qui vous servira vraiment. Travaillez vos projets persos, explorez, testez, galérez, ratez et recommencez. Et surtout, tenez bon : ceux et celles qui réussissent, ce sont souvent les personnes qui n’ont jamais lâché.
Que signifie être un "creator" selon vous ?
Pour moi, c’est quelqu’un qui réussit à faire exister ses idées dans la vraie vie. Une personne qui trouve toujours des solutions. Beaucoup de gens ont de bonnes idées, mais les concrétiser, c’est une autre histoire. Un créateur, c’est celui qui parvient à transformer une idée en réalité, que ce soit un film, une campagne, une soirée…
Quels sont vos projets pour l’avenir ?
Je ne sais pas encore où je serai dans cinq ans. Mais aujourd’hui, chez Tataki (RTS) nous avons beaucoup de liberté et un vrai impact, malgré des contraintes budgétaires réelles. On donne la parole aux gens, on suscite des émotions et on reçoit de super retours du public… C’est rare et précieux. Pour l’instant, je suis inspiré ici.
Avez-vous un exemple de campagne qui vous a marqué professionnellement ?
La campagne “Information is ammunition” pour le Canadian Journalists for Free Expression. Ils avaient reconstitué des silhouettes d’armes à partir de matériel photo/vidéo : une kalachnikov formée avec un appareil photo, un micro, etc. Le message est clair : les images font plus de bruit que les armes. Ça m’a marqué et ça a particulièrement du sens aujourd’hui.